L'exposition des Parisiens à la pollution atmosphérique, principalement d'origine routière, est inquiétante. Une étude d'Airparif, l'organisme de surveillance de la qualité de l'air en Ile-de-France, rendue publique mardi 4 décembre, montre que tous les établissements de la capitale accueillant des publics "sensibles" – jeunes enfants, personnes âgées ou hospitalisées – situés à moins de 50 m d'un axe routier à fort trafic dépassent les valeurs limites de particules fines, de dioxyde d'azote et de benzène.
Pas moins de 128 écoles, regroupant 28 000 élèves de maternelle et de primaire, 85 crèches (3 250 places), 66 hôpitaux (6 700 lits), 36 hébergements pour personnes âgées (2 500 places) sont concernés, soit 40 000 personnes.
Les équipements sportifs de plein air sont moins touchés : plus de 80 % des infrastructures de la région sont situés dans des zones respectant les normes. Mais 40 terrains, en particulier à Paris et dans les Hauts-de-Seine, présentent des teneurs maximales supérieures à l'ensemble des normes.
On trouve aux abords du périphérique, l'autoroute urbaine la plus fréquentée d'Europe avec plus de 270 000 véhicules par jour, des terrains de sports, des stades, utilisés par les établissements scolaires.
Ces chiffres sont alarmants, car la pollution de l'air est responsable, d'après l'Organisation mondiale de la santé (OMS), de la mort prématurée de 42 000 personnes chaque année en France.
"Depuis vingt ans, souligne René Dutrey, l'adjoint (EELV) au maire de Paris chargé de l'environnement, les cas d'asthme ont augmenté en France de 40 % et 2,5 millions de personnes sont en situation d'insuffisance respiratoire en France. Cette étude confirme une fois de plus que la situation est extrêmement préoccupante pour les Franciliens et en particulier à Paris, où se concentrent les axes routiers."
La situation dans la capitale est en effet la plus critique. Les trois quarts des établissements situés à moins de 50 m d'un grand axe de circulation se trouvent sur le territoire parisien. L'étude d'Airparif montre qu'à plus de 250 m de distance des flux routiers, les dépassements des normes de pollution sont très rares, sauf à Paris.
"Près de 30 % de la population de l'agglomération parisienne vit à moins de 75 m d'un axe à fort trafic routier. Cette proximité est responsable de 16 % des nouveaux cas d'asthme chez les moins de 17 ans", souligne Sabine Host, coauteur d'une étude sur l'impact sanitaire de la pollution. Les communes de la petite et grande couronne sont moins affectées.
Mais, au regard des objectifs de qualité définis par l'Union européenne, tous les établissements de la région dépassent la concentration maximale de particules fines PM 2,5, les plus petites, celles qui entrent le plus profondément dans les poumons et sont les plus dangereuses pour la santé. Ces particules sont notamment émises par les moteurs diesel.
Les écologistes réclament depuis plusieurs mois une "sortie" du diesel et demandent au gouvernement de mettre fin à la politique fiscale avantageuse dont bénéficient ces voitures. La France représente le parc le plus "diélisé" au monde. Des pays comme le Japon ont interdit sa fabrication.
Cette étude devrait relancer le débat sur l'opportunité de constituer rapidement des zones d'actions prioritaires pour l'air, que le gouvernement Fillon avait échoué à réaliser. La ministre de l'écologie, Delphine Batho, a promis de nouvelles propositions début 2013, avec les communes volontaires. Le maire de Paris, Bertrand Delanoë, a proposé d'interdire les véhicules anciens et d'instaurer des péages métropolitains.
La France a déjà beaucoup de retard. De nombreux pays d'Europe, notamment la Suède et l'Allemagne, se sont dotés de ces zones et ont enregistré des résultats très significatifs. De plus, la France n'aura pas le choix : la Commission européenne l'a assignée devant la Cour de justice européenne pour ce dépassement répété des normes. Il est peu probable qu'elle échappe à de lourdes sanctions financières.
Sur le plan de la santé, l'amélioration de la qualité de l'air dans les grandes villes françaises pourrait faire gagner quatre à huit mois de vie à leurs habitants.